Parlement francophone bruxellois
Interpellation de Fatoumata SIDIBE, députée MR-FDF, à Emir KIR, Ministre chargé de l’Action sociale et de la famille – 5 mars 2010
Concerne : Les mutilations génitales féminines. L’interpellation est disponible ici.
Le compte-rendu est disponible page 13 en cliquant ici
Pratiquées essentiellement en Afrique subsaharienne et dans la péninsule arabique, les mutilations génitales féminines ont été définies par L’Organisation Mondiale de la Santé (OMS) comme étant « toutes les interventions aboutissant à une ablation partielle ou totale des organes génitaux externes de la femme et/ou toute autre lésion des organes génitaux féminins pratiquée à des fins non thérapeutiques ».
Depuis quelques années la Belgique accueille de plus en plus femmes victimes qui sont originaires de pays qui pratiquent l’excision.
Une première estimation préliminaire du nombre de femmes excisées en Belgique et du nombre de filles à risques a été faite sur base des registres de la population et des étrangers. Au 1er janvier 2002, on dénombrait 2.745 femmes excisées en Belgique, et 534 filles et fillettes risquaient de subir pareille intervention.
Ces chiffres ne tiennent pas compte des demandeurs d’asile, des femmes sans domicile légal, ou des femmes qui avaient obtenu la nationalité belge. En 2007 en Communauté française, 280 filles sont nées dans des familles provenant de pays pratiquant l’excision.
En 2007, un sondage réalisé par le GGOLFB auprès de 254 membres du groupement révèle que 8 demandes d’infibulation ont été formulées cette année là. Plusieurs médecins (gynécologues et urologues) ont déjà été confrontés à des demandes d’excision de la part de parents pour leurs enfants.
Les professionnels de la santé, les intervenants des secteurs de l’accueil des migrants, travailleurs sociaux, secteurs de l’aide de la jeunesse et de l’enfance, enseignants sont amenés à rencontrer des jeunes filles et des femmes confrontées à des souffrances résultant de complications physiques ou psychiques consécutives à une mutilation, se trouvant dans des situations complexes où elles-mêmes, leurs filles ou des membres de leur entourage, risquent d’être mutilées (lors d’un retour au pays pendant les vacances par exemple).
Le temps des vacances est parfois le temps des couteaux et des lames car il existe un risque réel d’excision lors d’un retour au pays. Des filles qui vivent en Europe ont également été excisées lors de retour au pays pendant les grandes vacances. Elles l’ont été par surprise sans qu’on les prévienne. Il est par ailleurs déjà arrivé que des petites filles soient excisées en Europe à la demande de leurs parents.
Au niveau juridique, notre pays a d’ailleurs pris les mesures adéquates puisque dès 2001 la Belgique s’est dotée d’une loi spécifique qui punit les mutilations génitales féminines
Le Code Pénal se réfère spécifiquement à toute forme de mutilation des organes génitaux d’une personne de sexe féminin et prévoit à cet égard des peines d’emprisonnement pour quiconque aura pratiqué, facilité ou favorisé toute forme de mutilation, ainsi que pour les tentatives.
Le travail de terrain est, on le sait, essentiel pour une prévention et une sensibilisation efficace. La COCOF soutient, pour ce faire, différentes associations sur le terrain.
On recense plusieurs associations et institutions belges, actives dans le domaine des mutilations génitales féminines. Elles agissent à différents niveaux :
– Prévention (travail auprès des communautés concernées et formation des professionnels de santé) : le GAMS Belgique (Groupe pour l’abolition des mutilations sexuelles féminines) qui existe depuis 1996 à Bruxelles.
Deux organisations plus récentes, La Palabre à Bruxelles et Le Collectif liégeois contre les MGF, organisent également des activités de prévention et de sensibilisation.
Le GAMS Belgique a entamé depuis 2008, en partenariat avec l’Observatoire du Sida et des Sexualités, un processus de coordination des différents acteurs – les Stratégies concertées de lutte contre les MGF (SCMGF) – qui a abouti à la réalisation d’une analyse de situation de la problématique en Belgique et à la réalisation d’un plan opérationnel concerté qui a été lancé le 6 février à l’occasion de la journée internationale contre l’excision.
– Soutien juridique : Depuis janvier 2009, l’asbl Intact qui déploie ses activités sur le terrain juridique. Elle conseille, oriente et soutient les personnes (professionnels ou membres de la famille) dans les procédures judiciaires en cas de risque ou d’excision avérée.
– Recherche : L’International Centre for Reproductive Health (IRCH), lié à l’Université de Gand qui dispose d’une longue expérience de recherche sur l’excision en Europe en matière de santé et de législation.
’Observatoire du Sida et des Sexualités à Bruxelles et l’Institut de Médecine Tropicale à Anvers se sont récemment impliqués dans des recherches qualitatives et quantitatives sur les MGF.
Chaque professionnel, dans son champ de compétence, peut contribuer à une meilleure prise en charge et prévention des mutilations génitales féminines. La prévention et la sensibilisation constituent un des volets importants. L’école est le lieu où il est possible et important d’aborder la question des mutilations génitales féminines.
En matière d’information, de sensibilisation et de prévention, les « Stratégies concertées de lutte contre les mutilations génitales féminines (SC-MGF) préconisent d’inclure la thématique des MGF dans les cours d’éducation à la vie affective et sexuelle dans l’enseignement primaire et secondaire.
Cela permettra de contribuer à aider les filles mineures à risques et leur entourage à disposer de ressources nécessaires pour empêcher les mutilations.
Dans ce domaine, notre assemblée a adopté en 2009 une proposition de résolution relative à la lutte contre les mutilations génitales féminines.
Cette résolution vise à ce que plus d’actions soient menées, entre autres, en vue de soutenir et de subventionner de manière structurelle les associations de femmes migrantes luttant contre les MGF, de systématiser les efforts de sensibilisation des populations immigrées, des professionnels de l’éducation et de la santé, en concertation avec la communauté française, d’assurer la mise en œuvre de la loi belge sanctionnant les mutilations génitales féminines.
Plus récemment, la « Note d’orientation relative à la politique en matière de lutte contre les violences entre partenaires » a également été communiquée conjointement par la Région wallonne, la Communauté française et la Commission communautaire française. Celle-ci est positive mais encore faut-il que toutes les mesures proposées soient effectivement menées à bien …
Je souhaiterais, dans le cadre de cette interpellation, interroger le Ministre sur les actions menées et sur les différents délais de mises en œuvre des propositions reprises dans la Note d’orientation. Quels sont les priorités qui ont été établies ?
En outre je souhaiterais savoir s’il est prévu d’inclure la thématique des MGF dans les animations à la vie relationnelle, affective et sexuelle en milieu scolaire. Pourriez-vous nous faire part des décisions prises à cet égard à l’occasion du dernier Gouvernement conjoint ?
Afin d’obtenir un aperçu plus précis et actualisé, une nouvelle étude de prévalence des femmes excisées sur le territoire était en cours en 2009. Pourriez-vous nous informer sur les résultats de cette étude ?