Parlement régional
Interpellation de Mme Fatoumata SIDIBE, Députée bruxelloise DéFI, à M. Didier GOSUIN, Ministre de l’Economie, de l’Emploi et de la Formation professionnelle – 2 juin 2016. La réponse est disponible ici.
Concerne : Discrimination à l’embauche.
Phénomène encore trop présent de nos jours, la discrimination à l’embauche est omniprésente et peut toucher chacun d’entre nous. En effet, la discrimination se présente sous toutes ses formes, non seulement à cause de son origine, ses croyances, de son âge, de son sexe, de son appartenance à un genre…. La discrimination est à proscrire au plus vite, le non-engagement d’une personne doit être fondé sur des seuls critères objectifs.
Il est primordial de continuer à conscientiser les employeurs que la diversité au sein d’une entreprise, loin d’être une tare, est une richesse. Les services publics doivent bien entendu donner l’exemple.
Les chiffres continuent à être alarmants (voir les conclusions du monitoring socio-économique 2015). En outre, au niveau européen, Bruxelles est l’une des capitales où la discrimination à l’embauche est la plus marquante; un comble pour la capitale de l’Europe qui se doit d’être un modèle, notamment en termes de diversité…
De plus, plusieurs études montrent l’ampleur du phénomène de la répartition ‘ethnique’ des Emplois, des statuts et des salaires. Il s’agit de l’ethno stratification’ du marché du travail.
« En Région bruxelloise, les différentes catégories de travailleurs et de chômeurs n’ont manifestement pas les mêmes chances ‘statistiques’ d’accéder à l’emploi, ni aux emplois les meilleurs ». En fonction de l’origine, on retrouve certaines personnes dans des secteurs bien particuliers (services aux entreprises, intérim, nettoyage, bâtiment, horeca, soins de santé). En revanche, ils moins présents dans d’autres secteurs, notamment ceux dont les salaires moyens sont les plus élevés (services financiers, bureaux d’étude et de consultance, services publics…).
Il y a bien sûr la question de l’inadéquation entre l’offre et la demande, celle des diplômes et des qualifications mais à diplôme et qualifications égales, les inégalités d’accès à l’emploi restent criantes.
On ne peut plus avancer l’argument classique de l’absence de qualifications eu égard à l’accroissement du nombre de diplômés universitaires, tant parmi les anciennes que les nouvelles migrations, en particulier subsahariennes.
Il est anormal que les emplois de qualité et de grade supérieurs continuent à profiter majoritairement à des Belges aux noms à consonances « belge » alors que les citoyens belges au nom d’origine étrangère soient employés dans des emplois inférieurs. Par ailleurs, cette sous-utilisation du capital humain ne profite pas à l’économie.
Les personnes victimes de leur origine ne sont pas les seules à subir des discriminations. Que dire des personnes handicapées qui subissent des quantités de préjugés. En effet, les employeurs ne sont pas toujours prêts à accueillir des personnes handicapées de peur de l’absentéisme de ces derniers ou encore de l’aménagement que cela impliquerait….. Or, de nombreux soutiens sont mis en œuvre pour aider les employeurs lors de l’engagement d’une personne en situation de handicap. Il y a un travail à faire pour déconstruire les préjugés.
De multiples démarches ont été entreprises : la création d’un guichet anti-discrimination, la possibilité d’adhérer à la Charte de la diversité, l’opportunité d’obtenir le label diversité ainsi que toute une série de lois : loi antiracisme, loi sur l’égalité de traitement entre hommes et femmes, loi anti-discrimination…. Ces différentes mesures démontrent la volonté d’éradiquer la discrimination, de permettre à toute personne d’accéder à l’emploi qui correspond à ses compétences.
Ce sont également différentes portes qui permettent aux victimes de trouver réparation ou de pouvoir bénéficier d’un soutien lors d’agissements déplacés des employeurs qui les laissent bien souvent démunis….
Ces discriminations sont à l’embauche mais aussi à l’emploi. Dans un communiqué de presse du 3 mai, l’Institut pour l’égalité des femmes et des hommes constate que malgré des droits égaux et le fait qu’elles représentent la majorité de la population, les femmes sont toujours les principales victimes d’inégalités et de discriminations. Il note l’emploi, comme un milieu où les inégalités se creusent. Dans la sphère du travail, les femmes subissent tout particulièrement des discriminations, qui affectent leur quotidien, leur carrière et leur vie (discriminations à l’embauche, et/ou relatives à leur grossesse et leur maternité).
Noyer les femmes dans la diversité alors qu’elles représentent la majorité de la population, ajoute à l’invisibilité des discriminations qu’elles subissent.
Interviewé dans le Soir du week end dernier, le directeur général de l’Office bruxellois de l’emploi livre le bilan des cinq dernières années. Parmi les faiblesses, il pointe la discrimination à l’embauche et la question de la diversité dans les entreprises bruxelloises. Il parle d’une « injustice fondamentale » Et de renchérir que « nous ne sommes pas bons pour lutter contre les discriminations à l’embauche et promouvoir la diversité ailleurs que dans les projets pilotes. Il faut « dit-il quelque chose de massif qui soit une vraie intégration en particulier des personnes d’origine étrangère ». Il avance que sur « les 34 000 employeurs bruxellois, seuls 111 ont établi un plan diversité ». Et dit il, « pourquoi pas un bonus ou des aides à l’embauche ? ».
Les questions qui suivent et les réponses qui me parviendront, je l’espère, nous permettront de nous éclairer afin de construire ce modèle de capitale diversifié, tolérante et juste.
1. Lors d’une précédente interpellation, vous nous aviez informé qu’aucune plainte n’avait été déposée sur base de l’ordonnance du 8 mai 2009 relative à la surveillance des réglementations en matière d’emploi. Des mesures ont-elles été envisagées pour encourager les victimes de discrimination à utiliser cet instrument? Si oui, lesquelles?
2. Pourrions-nous ré envisager l’opération « mystery shopping » au niveau de la Région de Bruxelles-Capitale ? Les résultats de cette opération pourraient nous donner une idée plus large de la discrimination pratiquée.
3. Une fois que l’entreprise a signé la Charte de la diversité, y-a-il un contrôle du respect de la Charte ? Y-a-t-il des sanctions prévues en cas de non-respect ? La politique de diversité est-elle bien intégrée à la stratégie globale de l’entreprise et ce de manière visible (communiqué de presse, lettres aux collaborateurs) ? Y-a-t-il des incitants octroyés aux entreprises afin que les entreprises puissent mettre les mesures nécessaires en place pour atteindre les objectifs de la Charte ?
4. Depuis la mise en place du plan diversité dans les entreprises, a-t-on vu une augmentation de l’embauche de personnel répondant aux critères diversité ? A-t-on vu une augmentation des entreprises adhérant à la Charte de la diversité ?
5. En ce qui concerne le guichet anti-discrimination a-t-on vu davantage de plaintes aboutir à une sanction
6. Vous avez émis le souhait de repenser la Charte de la diversité et l’ensemble des outils, à savoir une collaboration entre employeurs et travailleurs pour lancer un processus de développement d’une politique de diversité dans l’entreprise pour le courant du premier semestre 2016. Où en est le processus de cette « Charte repensée »?
7. Actuellement, le guichet d’information sur la discrimination à l’embauche d’Actiris se situe à l’antenne de Bruxelles-Ville. Dans le cadre de la décentralisation, il a été décidé de constituer un réseau de conseillers référents dans toutes les antennes d’Actiris, et cela afin que tout chercheur d’emploi qui, lors de ses entretiens, se sent victime de discrimination, puisse directement en référer au conseiller référent de son antenne. Ce conseiller prend alors acte du « récit » du chercheur d’emploi et le transmet au guichet qui prend le relais. Toutes les antennes d’Actiris ont-elles un conseiller référent ?
8. Vous avez émis l’hypothèse d’organiser des tests de discrimination sans infliger de sanction, est-ce que cette possibilité est toujours envisagée ?
9. Vous avez signalé, lors d’une précédente interpellation, que vous vous informeriez auprès du ministre fédéral M. Peeters de toutes les situations de discrimination. Avez-vous entrepris de telles démarches ? Si oui, serait-il possible de nous faire parvenir cette liste des entreprises qui discriminent ?
10. Lors d’une précédente interpellation, vous aviez envisagé de discuter avec le Conseil de la non-discrimination et de la diversité, afin de mettre sur pied des projets d’action de recrutement neutre. Où en est ce projet ? En quoi va-t-il exactement consister ?
11. Vous vous êtes engagé à une garantie pour la jeunesse. Tout jeune de moins de 25 ans qui quitte ses études sans réussite sera informé dans le mois des services auxquels il peut prétendre, suivi d’une orientation dans les 4 mois, soit vers un emploi, un stage, une formation ou un retour vers les études. Combien de jeunes ont sollicité un soutien en matière d’intégration sociale ? Combien, après ce soutien se sont vus obtenir un emploi ? Un stage ? Une formation ? Combien ne sont toujours pas orientés vers une solution ? Depuis combien de temps ? Avez-vous des statistiques par rapport aux écueils rencontrés par les jeunes dans le cadre de la garantie jeunes ?
12. Est- ce qu’une présélection de candidats par Actiris a été mise en place ?